Nous avons vu (page 115) qu'on peut en utiliser une partie :
Mais il n'est évidemment possible d'affecter à cet usage qu'une partie de la vapeur d'échappement, son rôle principal est de produire le tirage forcé nécessaire à la combustion qui s'opère dans le foyer (page 97).
Si l'usage nous a accoutumé à voir la vapeur d'échappement utilisée à produire ce tirage forcé, il ne faut pas perdre de vue que celui-ci aurait pu tout aussi bien être obtenu par d'autres moyens ; par exemple, en employant un ventilateur ou en dirigeant dans la cheminée un jet de vapeur vive ; mais ces procédés auraient été coûteux et l'on ne pouvait certes être mieux inspiré qu'en recourant pour cet usage à la vapeur de décharge, sans emploi et produite en quantité d'autant plus grande que la locomotive développe plus d'effort.
Les tuyaux de décharge venant des cylindres se réunissent dans la boîte à fumée de manière à ne plus former qu'un tuyau unique, dont l'ouverture débouche dans l'axe de la cheminée (fig. 569).
Fig. 569 | Fig. 570 |
Mécanisme de l'échappement |
La vapeur, sortant à une très grande vitesse par la cheminée, entraîne les gaz qui l'entourent et qui remplissent la boîte à fumée. Ce départ des gaz crée dans la boîte à fumée un certain vide, c'est-à-dire que la pression y devient moindre que la pression atmosphérique ; cette diminution de pression ou cette dépression, comme on l'appelle encore, se propage en s'affaiblissant quelque peu à travers la tubulure jusque dans le foyer. Il en résulte que l'air extérieur, aspiré par la dépression atmosphérique, filtre à travers la grille, traverse le combustible en le brûlant ; les gaz résultant de celle combustion s'engouffrent à travers la tubulure, débouchent dans la boite à fumée et là, sont entraînés au dehors par la vapeur de décharge. Tel est le mécanisme de l'échappement.
Le tirage forcé ainsi obtenu ne coûterait rien, si la vapeur sortant du tuyau de décharge était à la pression atmosphérique, mais nous allons voir qu'il ne peut en être ainsi.
Il est clair que, pour un même poids de vapeur rejeté par l'échappement, l'entraînement des gaz est d'autant plus énergique que la vapeur sort avec une vitesse plus grande par la décharge. Or, cette vitesse elle-même sera d'autant plus forte que la pression de la vapeur d'échappement sera supérieure à la pression atmosphérique, car, si elle lui était égale, la vapeur se dissiperait sans vitesse à l'air extérieur.
Cet excédent de pression et la vitesse qui en résulte s'obtiennent en étranglant le tuyau d'échappement. On comprend, en effet, qu'à vitesse de piston égale, pour que le débit de vapeur reste le même quand la section du tuyau d'échappement est réduite, par exemple, de moitié, la vitesse doit forcément devenir double (ceci ne serait toutefois rigoureusement exact que si la vapeur était incompressible, ce qui n'est pas).
Mais dès qu'on rétrécit de la sorte le tuyau de décharge, le piston refoule beaucoup plus difficilement la vapeur dans l'échappement ; les choses se passent comme si le tuyau de décharge se terminait par un robinet incomplètement ouvert, le piston devra naturellement faire un effort plus grand pour pousser la vapeur au dehors que si ce robinet était ouvert en grand. La résistance qui s'oppose ainsi au mouvement du piston constitue une contre-pression ; celle-ci, d'autant plus forte qu'on étrangle davantage la décharge, diminue le travail utile que la vapeur vive produit sur les pistons.
En résumé, l'étranglement de la décharge augmente le tirage, ce qui est un avantage du côté vaporisation de la chaudière, mais crée une contre-pression sur les pistons, ce qui est une perte de puissance du côté moteur.
Nous en concluons que le système le meilleur sera celui qui produira la dépression nécessaire dans la boîte à fumée avec la contre-pression la plus faible sur les pistons.
La contre-pression se mesure par l'excédent de pression de la vapeur de décharge sur la pression atmosphérique ; elle varie de 150 grammes par cm² à 500 gr/cm², selon que l'on marche à faible allure ou que l'on force celle-ci. Il arrive qu'elle atteigne 800 gr/cm².
La contre-pression qui résulte du rétrécissement de la tuyère constitue la pression motrice qui force la vapeur usagée à pénétrer dans l'atmosphère avec une certaine vitesse et c'est cette vitesse qui provoque l'aspiration des gaz du foyer.
La valeur de la dépression s'exprime généralement par la dénivellation d qu'elle produit sur l'eau contenue dans un tube en verre courbé en forme d'U, ouvert aux deux bouts et monté sur la boite à fumée comme l'indique la figure 571.
Au repos, la dépression étant nulle (ou à peu près nulle), le niveau de l'eau est le même que dans les deux branches, il correspond au zéro.
En marche, la pression atmosphérique extérieure l'emporte sur la pression qui existe dans la boîte à fumée, fait descendre l'eau dans la branche A et la fait monter dans la branche B. Si l'on mesure le nombre h de mm de la colonne d'eau à partir du zéro, la dépression d sera double, c'est-à-dire égale à 2h mm.
Fig. 571
Mesure de la dépression dans la boite à fumée.
Il faut avoir soin d'assurer l'étanchéité du joint du tube à la traversée de la tôle de la boîte à fumée au moyen d'une bague en caoutchouc.
La valeur convenable à obtenir pour la dépression dépend :
La dépression voulue s'obtiendra en donnant à la cheminée et au tuyau de décharge des dimensions respectives convenables, ainsi qu'en fixant judicieusement leur position relative. Il convient, pour que l'action du tirage se produise avec assez d'uniformité sur la grille, que l'orifice de décharge se trouve à un niveau déterminé et il importe que l'axe du tuyau de décharge coïncide avec celui de la cheminée, afin que le jet de vapeur ne soit pas dévié.
La dépression varie ordinairement entre 100 et 300 mm d'eau.
Pour une même machine et un même combustible, la dépression et conséquemment le tirage varient essentiellement avec le poids de vapeur rejeté par seconde par l'échappement. Or, ce poids augmente quand la locomotive développe plus de puissance, le tirage se règle donc de lui-même suivant les besoins. L'on comprend dans ces conditions qu'on peut fixer une fois pour toutes les dimensions de l'orifice de décharge, c'est-à-dire adopter un échappement fixe.
Ce raisonnement suppose que chaque kilogramme de charbon brûlé vaporise toujours la même quantité d'eau ; or, il n'en est pas rigoureusement ainsi : quand la vaporisation est intense, le poids d'eau vaporisé par kilogramme de combustible est plus faible qu'à allure réduite.
On peut par conséquent, lorsque l'on vise à marcher normalement à différentes allures ou à utiliser des combustibles de différentes natures, être conduit à faire varier l'étranglement de la décharge.
On rencontre donc des locomotives avec orifice d'échappement fixe et d'autres avec orifice d'échappement variable.
Des expériences récentes et notamment celles entreprises par l'ingénieur français André Chapelon, ont mis au point la théorie du tirage forcé.
Pour créer une dépression de h mm d'eau dans la boîte à fumée, il faut faire passer par la tuyère d'échappement une quantité déterminée de vapeur de q kg par seconde et, lorsque ce vide de h mm sera obtenu, il provoquera une allure de combustion sur la grille telle que la chaudière pourra produire une quantité de vapeur Q kg supérieure à la quantité de vapeur q exigée par l'échappement pour donner la dépression h.
Montrons cela sur une figure. Si nous marquons sur l'horizontale O hm (fig. 572) les valeurs successivement croissantes de la dépression h mm d'eau et si, pour chacune de ces valeurs, nous portons perpendiculairement des hauteurs exprimant les valeurs respectives de q d'abord et de Q ensuite, correspondant à ces valeurs de h, nous obtiendrons deux courbes n° 4 et n° 1 représentant, d'une part, la quantité q kg de vapeur passant par l'échappement et, d'autre part, la quantité Q kg de vapeur produite par la chaudière.
Fig. 572
Nous voyons, par exemple, que pour créer une dépression de h1 mm d'eau dans la boîte à fumée, l'échappement exigera qu'une quantité de vapeur q1 kg passe par seconde à travers la tuyère et, lorsque ce vide h1 sera créé, il provoquera sur la grille une allure de combustion telle que la chaudière pourra produire une quantité de vapeur Q1 kg supérieure, comme nous le voyons, à la quantité de vapeur q1 kg nécessaire pour produire le tirage voulu.
Remarquons que, aussi longtemps que l'on ne prélève pas de vapeur à l'échappement, les quantités de vapeur q et Q sont égales puisque la quantité de vapeur produite Q par la chaudière s'écoule en totalité par la tuyère d'échappement.
D'autre part, puisque la quantité de vapeur exigée par l'échappement est moindre que la quantité de vapeur que la chaudière peut produire, il s'ensuit que la vaporisation pourra être poussée progressivement sans qu'il soit nécessaire de modifier le réglage de la tuyère d'échappement.
Les expériences ont encore montré que l'insuffisance de production de vapeur d'une chaudière peut très bien ne pas provenir d'une insuffisance de ses dimensions (surface de grille, par exemple), mais peut très bien avoir pour cause un dispositif d'échappement défectueux ou un dispositif convenable mais mal réglé.
Les expériences ont révélé que l'utilité des dispositifs d'échappement à ouverture variable est très restreinte et, une fois que l'on a réglé par expérience la section de tuyère qui donne une bonne vaporisation à toutes les allures, le machiniste n'éprouve pas le besoin de la modifier, tout au moins, aussi longtemps qu'il emploie le même charbon. Ce qui veut dire que, pratiquement, l'échappement variable devient, en fait, un échappement fixe.
Influence sur le tirage d'un prélèvement de vapeur à l'échappement. - Qu'en advient-il dans ce cas de la dépression, de la vaporisation, de la contre-pression et de la surchauffe éventuelle ?
Quand on prélève une certaine quantité de vapeur sur l'échappement, soit pour faire fonctionner un injecteur, soit pour réchauffer l'eau d'alimentation, la quantité de vapeur usagée qui sort par la tuyère est moindre que celle qui passe par les cylindres. Il s'ensuit que la contre-pression sur les pistons est moindre et, toutes choses égales, la dépression est plus faible.
Dans de telles conditions, l'on pourrait croire que la vaporisation sera moins facile et qu'il faudra resserrer l'échappement s'il est variable ou utiliser un échappement fixe approprié. Cela n'est pas certain parce que, par le réchauffage de l'eau d'alimentation, l'on introduit des calories dans la chaudière. On devra donc brûler moins de charbon et le tirage pourra être plus faible sans inconvénient. Il ne faudra pas nécessairement resserrer l'échappement.
Cependant, l'expérience montre que l'activité réduite de la combustion donnera lieu à une température de surchauffe légèrement inférieure.
En ce qui concerne la contre-pression, si le prélèvement de vapeur à l'échappement est de 15 %, par exemple, la quantité de vapeur qui passera par la tuyère ne sera plus que de 85 % de la quantité de vapeur qui aura passé par les cylindres.
Comme les contre-pressions sont approximativement proportionnelles aux carrés des débits de vapeur, les contre-pressions seront dans le rapport de 1² à O,85², c'est-à-dire dans le rapport de 1 à 0,72, selon qu'il n'y aura pas ou qu'il y aura réchauffage de l'eau d'alimentation.
Nous en déduisons que si l'on marche à faible allure avec alimentation par injecteur ordinaire et que la contre-pression est, par exemple, de 100 grammes par cm², cette contre-pression tombera à 72 grammes par cm² dans le cas du réchauffeur d'eau à vapeur d'échappement.
Mais si l'on marche à forte allure avec une contre-pression de 300 grammes par cm², par exemple, la contre-pression nouvelle sera de 500 x 0,72 = 360 grammes par cm², soit un gain de 140 grammes par cm². Ce gain, dans le cas d'une machine de vitesse roulant à 140 km/h, équivaut à un gain de puissance de 80 à 100 chevaux.
En conclusion, outre l'économie de chaleur qu'il donne, le réchauffeur à vapeur d'échappement est intéressant sur les machines très poussées et à très grande vitesse, puisqu'il permet de réduire sérieusement la contre-pression à l'échappement.
Fig. 573
Echappement fixe.
L'échappement fixe belge est représenté fig. 147 et 573, il se compose simplement de deux parties :
Presque toutes les locomotives belges sont munies d'un échappement fixe.
Les systèmes qui permettent de faire varier la section de l'orifice de décharge sont très nombreux.
Fig. 574 et 575
Echappement variable de la Compagnie du Nord.
Nous ne décrirons que l'échappement variable à cône mobile. Ce dispositif comporte une pièce conique annulaire représentée en noir (fig. 574-575) présentant intérieurement trois ailettes radiales. Ce cône est porté par une tige centrale dont la hauteur peut être réglée à volonté au moyen d'un levier. Lorsque le cône est complètement levé (fig. 574), la vapeur ne peut s'écouler que par l'intérieur du cône. Lorsque le cône est abaissé (fig. 575), la section d'écoulement est notablement plus grande. A l'orifice intérieur du cône s'ajoute une section annulaire dont l'importance varie avec la position donnée au cône mobile.
Les trois ailettes radiales, qui se trouvent à l'intérieur du cône mobile, présentent une surface hélicoïdale (voir coupe AB) ce qui a pour effet d'accentuer l'épanouissement du jet.
Ce type d'échappement à cône mobile est employé sur beaucoup de locomotives françaises.
L'échappement variable est supérieur en principe à l'échappement fixe, parce qu'il permet seul d'adopter un régime de marche normale approprié au travail à effectuer et au combustible utilisé.
Si la locomotive doit développer peu de puissance pour assurer son service, on ouvre l'échappement, ce qui est avantageux avons-nous vu pour le rendement de la machine.
Si, au contraire, l'allure de la machine doit être forcée, on resserre l'échappement, quitte à sacrifier l'économie de combustible.
Les appareils de décharge variable laissent, par contre, souvent à désirer du point de vue de leur fonctionnement pratique ; ils comportent, en effet, une série d'organes frottant les uns sur les autres et qui se trouvent dans un milieu qui nuit beaucoup à leur bonne conservation ; ils nécessitent donc pour le moins un entretien constant.
Dispositif à «petticoat» des locomotives américaines.
Le système primitif d'échappement (fig. 147) ne comporte qu'une seule tuyère placée sous la cheminée, il ne réalise donc qu'un seul étage d'aspiration et c'est ce qui explique qu'il est difficile d'obtenir un tirage uniforme dans tous les tubes.
Sur les locomotives américaines, on rencontre le dispositif représenté figures 576 et 577 et qui comporte l'intercalation entre la cheminée C et la tuyère T d'un ou de plusieurs ajutages coniques P, appelés «petticoats», mot anglais qui signifie «jupe».
Fig. 576 Petticoat
Pour permettre le placement des petticoats, l'orifice de la tuyère est placé plus bas. Le jet de vapeur de décharge et les gaz chauds entraînés sont reçus dans le petticoat inférieur, celui-ci joue le rôle de tuyère par rapport au petticoat qui se trouve au-dessus de lui et ainsi de proche en proche jusqu'à la cheminée.
Fig. 577 Petticoats
Dans le cas de la fig. 577, nous voyons qu'il y a 3 zones d'aspiration : 1, 2 et 3. Par suite de cet échelonnement, le mélange de la vapeur de décharge et des gaz aspirés se fait dans de meilleures conditions. Enfin, les gaz étant aspirés à des hauteurs différentes, la dépression se répartit plus également dans le faisceau tubulaire et l'uniformité du tirage sur toute l'étendue de la grille est mieux assurée.
Le fait d'avoir plusieurs étages d'aspiration est particulièrement intéressant lorsque les différentes parties du faisceau tubulaire présentent une résistance inégale au passage des gaz, c'est le cas, par exemple, avec les tubes surchauffeurs.
C'est une application de ces principes que nous retrouvons sur la locomotive Atlantic type 12 (fig. 578).
Fig. 578. - Boîte à fumée de la locomotive Atlantic type 12.
Les lignes obliques AB, A'B' partant des tuyères, montrent le développement du cône de vapeur de décharge et justifient l'emplacement de chaque petticoat.
Le cadre CDEF sert de support à la grille à flammèches G.
Dispositifs modernes d'échappement.
1°) Tuyères à jets multiples. - L'ingénieur finlandais Kylälä a imaginé, en 1919, de placer immédiatement au-dessus de la tuyère de décharge un ajutage de forme spéciale (fig. 579 à 581), constitué de quatre tuyères s'amorçant sur une embase commune et dont la section transversale rappelle celle d'un trèfle à quatre feuilles.
Fig. 579 | Fig. 580-581 |
La partie inférieure est évasée pour favoriser l'aspiration des gaz.
2°) Echappement Kylchap. - L'ingénieur français Chapelon a utilisé l'échappement Kylälä conjointement avec le petticoat, réalisant ainsi l'échappement Kylchap, rappelant les noms des deux inventeurs (fig. 582, 583).
En 1931, la locomotive type 9 (n° 908) du dépôt de Bruxelles-Nord de la S.N.C.B, a été munie d'un échappement Kylchap. Cette locomotive était incorporée dans une série de services de trains à marche rapide, comprenant notamment les trains Pulmann : Ostende-Cologne, Bruxelles-Calais, Edelweiss.
Locomotives | Dépression en mm d’eau | Contre-pression en grammes par cm² | Différences |
Type 10 (échappement ordinaire) |
150 mm | 270 gr | -125 gr |
Type 9 (échappement Kylchap) |
150 mm | 145 gr | |
Type 10 (échappement ordinaire) |
90 mm | 140 gr | -65 gr |
Type 9 (échappement Kylchap) |
90 mm | 75 gr |
Le tableau ci-dessus donne la comparaison des résultats obtenus avec une locomotive Pacific type 10, munie d'un échappement ordinaire d'une part et la locomotive type 9, pourvue de l'échappement Kylchap, d'autre part.
L'on voit que, pour une même dépression de 150 mm d'eau, la contre-pression sur les pistons à l'échappement est de 125 gr par cm² moindre pour la locomotive type 9. Or, cette différence représente une économie de 66 chevaux.
Fig. 582. - Locomotive type 1, double cheminée
Echappement Kylchap.
Fig. 583. - Boîte à fumée de la locomotive type 1.
Les locomotives devenant toujours plus puissantes, les dimensions des cylindres et de la chaudière se sont accrues, l'axe de la chaudière s'est relevé, mais comme le gabarit, lui, n'a pas changé, la cheminée qui autrefois surmontait la boite à fumée, est aujourd'hui à peine apparente extérieurement (fig. 582).
Principes de construction. - Considérons une cheminée simple, montée dans l'axe de la tuyère de décharge (fig. 147 et 584).
L'expérience montre que le jet de vapeur prend une forme tronconique présentant une inclinaison de 1/10 (fig. 585).
Fig. 584 | Fig. 585 | Fig. 586 |
Il a été constaté que le tirage augmente avec la hauteur de la cheminée, mais pas dans une forte proportion. L'essentiel, c'est que le cône de vapeur touche les parois de la cheminée, et il est désirable que la cheminée ait une hauteur h égale au moins à son diamètre D, au-dessus de la circonférence de contact c.
Le contact doit se faire un peu au-dessous de l'orifice supérieur de la cheminée. Cette condition est indispensable pour permettre au jet de vapeur de couper la communication entre la boîte à fumée et l'atmosphère.
Si le diamètre D est trop grand (fig. 586), le jet passe à travers la cheminée sans toucher les parois el le tirage diminue considérablement. En effet, l'air atmosphérique pénètre alors dans la boîte à fumée par l'espace annulaire ainsi formé, ce qui réduit considérablement la dépression.
Si d'autre part, le jet de vapeur venait rencontrer trop tôt la paroi de la cheminée, il en résulterait un effet de turbulence nuisible (fig. 587).
Fig. 587
Double cheminée. - L'augmentation de la puissance des locomotives a entraîné l'augmentation de la surface de grille. Mais alors, pour que le tirage soit suffisant sur cette grille de grande surface, il faut agrandir tout le dispositif d'échappement dans la boîte à fumée et, notamment, augmenter la hauteur H (fig. 584 et 585), qui sépare l'orifice supérieur de la tuyère d'échappement de la base de la cheminée.
Malheureusement, on est bientôt arrêté dans cette voie par le gabarit qui limite la hauteur de la cheminée et, par là, limite la hauteur totale du dispositif d'échappement. On tourne la difficulté en employant deux cheminées jumelles correspondant à une tuyère d'échappement également dédoublée (fig.588). On peut alors conserver les hauteurs usuelles tout en assurant un fonctionnement normal du tirage de la locomotive.
Fig. 588
C'est en septembre 1933 que le système de la double cheminée a été appliqué pour la première fois par F. Legein à une locomotive Pacific type 10, de la S.N.C.B.
Il existe en Amérique des locomotives pourvues d'échappements quadruples.
Nous savons que la locomotive compound se distingue de la machine à simple expansion par ce fait qu'un seul des deux cylindres (ou groupe de deux cylindres) reçoit la vapeur vive venant de la chaudière et que la vapeur d'échappement de ce cylindre au lieu d'être dirigée vers l'air extérieur est admise dans le second cylindre où elle achève sa détente (voir p. 256).
Le cylindre en communication directe avec la chaudière est dit à haute pression, l'autre à basse pression.
Au moment, où la quantité de vapeur admise au cylindre HP commence à s'en échapper après sa détente partielle, elle occupait tout le volume de ce cylindre ; comme par le système compound, on prolonge sa détente, le volume du cylindre BP doit évidemment être plus grand que celui du cylindre HP.
Si les cylindres HP et BP communiquaient entre eux directement, quand le piston du petit cylindre refoulerait la vapeur d'échappement, le grand cylindre devrait être disposé pour l'admission, les pistons devant nécessairement être à fond de course en même temps ; en d'autres termes, les manivelles devraient passer en môme temps au point mort. On réaliserait ainsi le fonctionnement Woolf. Mais dans la locomotive, les manivelles sont calées à angle droit pour rendre le démarrage possible dans toutes les positions, il faut donc qu'au sortir du petit cylindre, la vapeur soit emmagasinée en attendant que le grand soit disposé à l'admission. Le réservoir placé entre les deux cylindres en vue de cet emmagasinage est ce qu'on appelle le réservoir intermédiaire ou receiver.
Examinons comment les locomotives compound se comportent au démarrage et considérons tout d'abord une compound à deux cylindres.
De deux choses l'une, ou le petit cylindre est à l'admission ou son admission est fermée. Dans ce dernier cas, le petit cylindre ne reçoit pas de vapeur, le grand non plus, puisque la vapeur ne peut passer dans le grand cylindre qu'après avoir traversé le petit, la machine ne démarre pas.
Si l'admission est ouverte, mais que la manivelle du petit cylindre soit dans le voisinage du point mort, la machine ne démarre pas davantage.
Ces considérations montrent que pour assurer le démarrage dans tous les cas, il faut prévoir un dispositif spécial permettant d'envoyer dans le receiver ou, ce qui revient au même, puisque ces capacités communiquent entre elles, dans la chapelle du grand cylindre, de la vapeur venant directement de la chaudière. On se sert à cette fin d'une prise de vapeur spéciale, placée à portée du machiniste et dénommée deuxième modérateur ou vanne de démarrage.
La pression de la vapeur admise ainsi au receiver doit être réduite parce que le grand cylindre étant destiné à ne recevoir que de la vapeur à basse pression, ses organes sont calculés en conséquence. Un manomètre indique au machiniste la pression qui règne au receiver et une soupape de sûreté limite en outre la pression à un taux déterminé.
Pour ce qui est des locomotives compound à quatre cylindres, leurs deux cylindres HP ont les manivelles calées à 90°, ces machines pourront toujours démarrer, la vanne spéciale n'est donc pas indispensable, mais elle peut être utile pour faciliter les démarrages et accélérer la mise en vitesse.
Echappement direct des locomotives compound. - Lorsqu'on admet de la vapeur vive dans le réservoir intermédiaire, il n'y a plus de raison d'y envoyer encore de la vapeur d'échappement du petit cylindre, le receiver étant déjà rempli de vapeur dont la pression est sensiblement égale et pourrait même être supérieure à celle de la vapeur qui sort du petit cylindre. Il est donc logique d'appliquer aux machines compound un dispositif complémentaire permettant de diriger la vapeur de décharge du petit cylindre directement dans l'atmosphère.
Cet échappement direct du petit cylindre procure un avantage important. L'effort moteur développé sur le piston HP est proportionnel à la différence des pressions qui s'exercent sur ses deux faces, c'est-à-dire à la différence entre la pression à la chaudière et la pression au receiver ; lorsqu'on envoie la vapeur de décharge du petit cylindre directement dans l'atmosphère, on diminue la contre-pression sur le petit piston, son effort moteur s'en trouve accru et le démarrage sensiblement amélioré.
Mais ce n'est pas là le seul avantage de l'échappement direct. Lorsque le machiniste provoque l'admission de vapeur vive au receiver et l'échappement direct du petit cylindre, il transforme sa locomotive compound en deux machines ordinaires à simple expansion indépendantes, de sorte que, dans le cas d'une compound à quatre cylindres tout au moins, il pourra donc, en cas d'avarie à la basse pression, isoler celle-ci et gagner le relais le plus proche en remorquant son train avec les cylindres HP. Si c'est la HP qui est avariée, il pourra marcher avec la BP.
Enfin, un troisième avantage - secondaire aussi longtemps que les lignes, desservies sont de niveau, mais qui devient sensible sur les longues pentes - le fonctionnement à machines séparées donne à modérateur fermé une marche plus roulante.
Si l'on rencontre des locomotives compound non munies de l'échappement direct aux cylindres HP, c'est que certains constructeurs, mettant en balance les avantages ci-dessus avec la complication et les risques nouveaux de fuites et d'avaries inhérents à ce dispositif complémentaire, renoncent aux premiers, appréciant davantage la tranquillité que leur assure la simplicité.
Les systèmes imaginés pour réaliser l'échappement direct des cylindres HP sont nombreux, nous ne décrirons que le dispositif de Glehn appliqué aux locomotives compound à quatre cylindres types 7, 8 et 33 de la S. N. C. B. (fig. 589 et 590).
Fig. 589. - Echappement des locomotives compound, types 7, 8 et 33 de la S.N.C.B.
Fig. 590. - Echappement des locomotives compound, types 7, 8 et 33 de la S.N.C.B.
Ces figures représentent les cylindres BP. La vapeur de décharge de chaque petit cylindre est amenée au grand cylindre correspondant par un tuyau T raccordé à un fourreau F coulé d'une pièce avec les cylindres BP.
Les chapelles des cylindres BP communiquent constamment entre elles et constituent avec les tuyaux T le réservoir intermédiaire.
Le fourreau F renferme un obturateur représenté en noir sur les figures. Cet obturateur qui tourne sur son axe, présente deux lumières qu'on peut amener alternativement en regard des ouvertures pratiquées dans le fourreau en vue des communications à établir.
Dans la marche normale en compound, qui est celle représentée sur les figures, les chapelles BP communiquent par la lumière A avec le tuyau T et par conséquent avec le cylindre HP, la vapeur d'échappement du petit cylindre se rend au grand cylindre en suivant les flèches 1. Quand elle a fini son travail au grand cylindre, la vapeur s'échappe à la décharge par les orifices N.
Pour cette position de l'obturateur, la lumière B est fermée. L'ouverture C est destinée au passage des eaux de condensation empruntant l'espace annulaire compris entre l'obturateur et le fourreau, pour aboutir à un purgeur automatique. De même, le trou t sert à la purge de l'obturateur en fonctionnement compound.
Pour parer aux mouvements et aux dilatations, le tuyau T est muni d'un bourrage à son entrée dans le fourreau F.
On réalise l'échappement direct des cylindres HP au démarrage et à modérateur fermé, en faisant tourner les obturateurs de 90°. Pour cette position, la lumière A se ferme, supprimant la communication entre le cylindre HP et le cylindre BP, tandis que la lumière B s'ouvre, permettant à la vapeur d'échappement du petit cylindre de se rendre directement à la décharge par le canal D et l'orifice central R (flèche 2).
La rotation des obturateurs s'obtient au moyen d'un servo-moteur à air comprimé E commandé de la marquise. Ce servo-moteur actionne les obturateurs par les tringles et les leviers représentés en traits interrompus sur les figures.
Au démarrage, la vapeur est admise, dans les conditions que nous avons décrites plus haut, dans la chapelle des cylindres BP où elle pénètre en K amenée par le tuyau V.